Les scalpforiums Hallstattiens du Sud-Ouest de la France
PAR
A. SOUTOU *
Les recherches récentes concernant le Premier Age du Fer dans le Midi de la France ont montré que le petit instrument de toilette que l'on désigne habituellement du nom latin de scalptorium et que l'on pourrait appeler en français gratte-peau, sinon gratte-pou, à en juger par l'épi- gramme de Martial rapportée par Déchelette (1), était très répandu entre le Rhône et les Pyrénées. En effet, pour la seule période Hallstattienne, 30 exemplaires ont pu être dénombrés dans les départements de l'Aude (20 exemplaires, dont 18 à Mailhac), de la Haute-Garonne (1 ex.), des Hautes-Pyrénées (1 ex.) de l'Hérault (2 ex.), de la Lozère (1 ex.), des Pyrénées-Orientales (2 ex.), et du Tarn (3 ex.). Aussi nous a-t-il paru intéressant de confronter ces nombreux gratte-peau et d'essayer d'étudier leur signification archéologique.
(*) Reçu 8.3.1958; séance de septembre 1958. 1) Manuel, III, p. 369 : «On s'est demandé à quoi servait exactement l'objet à pointe bifide qui accompagne la pincette et le cure-oreilles. Avec M. Hoernes, nous y voyons le scalptorium des Romains. Une épi- gramme de Martial indique l'usage de ce grattoir, auquel, à l'époque classique, le nombre et la forme de ses dents avaient donné l'apparence d'une main : Defendet manus haec scapulas mordente molesto Pulice vel si quid pulice sordidius ». (Que cette main défende nos épaules des morsures importunes de la puce ou d'un animal plus vil encore). Déchelette est, en France, le premier archéologue qui ait désigné du nom latin de scalptorium l'instrument protohistorique à double pointe dont nous nous efforçons de dresser l'inventaire pour le Sud-Ouest de la France. Ailleurs, notamment dans les pays de langue allemande, malgré les observations de Hoernes, le même objet est couramment appelé cure-ongles (Nagelreiniger) : cf. par ex., Germania, t. XXIX, 1951, p. 165 ou t. XXXI, 1953. p. 214. Déchelette a eu le mérite de reconnaître que cette épingle à double pointe, que l'on rencontre dès l'époque hallstattienne dans les habitats et les sépultures, était l'ancêtre du scalptorium romain, à deux, trois, quatre ou cinq dents, qui accompagnait dans les trousses de toilette le cure-dent (dentiscalpium) et le cure-oreille (auris- calpium). Cf. A. Rich, Dictionnaire des Antiquités Romaines et Grecques, Paris 1861, s. v. scalptorium; E. Saglio, Dictionnaire des Antiquités Grecques et Romaines, Paris, 1877, s. v. volsella : « pince à épiler... fréquemment réunie par le même anneau à un grattoir de tête (scalptorium) et à un cure-oreille (auriscalpium) »; F. Gafflot, Dictionnaire illustré Latin- Français, Paris, 1934, s. v. scalptorium : « Instrument pour se gratter ». Ces citations ne sont peut-être pas inutiles, car le scalptorium n'est pas très connu : il n'est ni figuré ni décrit dans le Saglio et il n'est mentionné ni dans le Pauli-Wissowa, ni dans le Reallexikon der Vorgeschichte de Ebert, ni même dans le Manuel d'Archéologie Gallo-Romaine de Cagnat et Chapot. Pour ce qui est de l'utilisation du scalptorium protohistorique, il nous semble que son usage comme cure-ongle est exclu : une simple
